Salomon et les sept métaux des mers

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~    SALOMON   ~

Et d’un rocher il vit une montagne claire

Où s’étant rapproché il put apercevoir

Ces temples éternels que bâtit dans sa gloire

Salomon par l’anneau des sept métaux des mers.

Et le premier d’entre eux en cristal aurifère

Etait veiné du bleu d’une musique ample

Et les pas qu’on faisait en entrant dans ce temple

Faisaient chanter la pierre en d’antiques prières.

En son sein une vasque à la clarté opale

Portait trois pierres bleu, carmin et d’un or rare,

Et chacune d’entre elles au souffle des regards

Fit naître un opéra de cette cathédrale.

Dans chacun de ses angles, de brûloirs d’encens bleu,

S’élevaient en volute une fumée orange

Où frémissait soudain le calme pas des anges

Et le souffle divin présageant de ce feu.

Là, des lames d’un or recouvert de topaze

Faisaient vibrer son toit à l’amble symphonique

Et chacune d’entre elle d’un feu doux et aurique

S’éclairait sous les doigts de ce piano turquoise.

Et des déesses nues recouvertes d’un voile

En tournant et chantant, de leurs doigts déversaient

Des pétales de fleurs qui ne tombaient jamais

Et de leur voix formaient un écho musical.

Du fronton apparut d’un Est ésotérique

Les rayons d’un soleil transporté de musique

Qui fit entrer dans l’air la symphonie magique

Que Berlioz écrivit de son encre mystique.

Et il vit en touchant ces colonnes vivantes

Qu’à la moindre des pierres en formant l’édifice

Correspondait une œuvre, un humble sacrifice,

Un doux pas sur la voie de la sagesse aimante.

Il vit ici en laissant ses doigts sur ces pierres

Comment cet homme avait étouffé sa colère,

Cette femme construit, malgré tant d’adversaires,

Un foyer aux enfants qu’elle fit beaux et fiers.

Comment tous ces efforts arrachés de leurs seins

Avaient fait ces cristaux dont vibrait tout ce temple,

Comment tout ce courage en témoin d’un cœur ample

Avait donné ce qui éclairait ce lieu saint.

Et le deuxième était d’une pure lumière.

Des couleurs infinies traversaient la bâtisse

Dont le regard des anges avait fait l’édifice

En puisant dans l’écho des transparentes pierres.

Et il vit que toute âme en demandant que vienne

Le Dieu d’amour dont elle attend la juste paix

Elevait vers le ciel un éternelle épée

Dont l’éclat préparait la marche de son règne.

Puis ayant mis son front sur un pilier central

Il vit dans celui-ci le pur regard d’un ange

Qui embrassa son âme en une danse étrange

Car il ne bougeait pas, buvant tout l’or du Graal.

Et cependant il devenait un peu du fleuve immense

Qui va de l’œil éther au souffle des lumières ;

Et dansait cependant en glissant sur la pierre,

Embrassant de ses mains cette âme et se fiancent ;

Et chacun de leurs pas faisait naître les sons

Qu’un ange recevait pour la donner un jour

A celle qui enfin écrirait par amour

L’union des états réunis par raison.

Et le troisième était un poème, un seul chant,

La symphonie douce d’un soleil bleu naissant,

Forêts, lacs, clartés bleues, écho évanescent

De ce monde, déjà, s’en allait lentement,

Lentement descendait de la montagne claire

Dont il voyait paraître encore un peu de feu,

Descendait dans la plaine, écoute encore un peu

Ces sons purs au lointain, entends, guette, espère …

Or ces temples lointains que fit naître à l’antan

Salomon par l’anneau des sept couleurs du ciel,

Il en vit le secret dans ce disque de miel

Qui surgit à l’orient dans un pétale blanc,

Il en vit la musique qui traverse en riant

Le disciple et le temps, dessinant fleurs et fruits,

Donne un goût à la vie, à ce qui fait ta vie,

A ta vie donne un son comme un cristal brillant.

Jean-Christophe Fadot.